Forestier   

L'importance des forêts dans la lutte contre le changement climatique

Publié le December 4, 2023 par Bernard Charlotin
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L'importance des forêts dans la lutte contre le changement climatique
La motivation écologique est de plus en plus présente chez les acheteurs de domaines forestiers en France. Il est vrai que la forêt, qui couvre 1/3 de la superficie de la France Métropolitaine, a une importance cruciale à jouer dans notre processus de réduction des gaz à effet de serre face au dérèglement climatique.
 
Sommaire 
1. La situation de la Forêt dans le Monde
2. Le changement climatique
    2.1. Les émissions de Gaz à Effet de Serre
    2.2. La déforestation
3. Les services environnementaux de la forêt
    3.1. L'absorption du carbone
    3.2. Le stockage du carbone
    3.3. Le cycle de l'eau et la régulation du climat
    3.4. L'alimentation et la santé
    3.5. La biodiversité
    3.6. Un matériau de construction durable
    3.7. Une énergie renouvelable
4. La forêt menacée par le changement climatique
    4.1. La déforestation et les feux de forêts
    4.2. Les nuisibles et les maladies
    4.3. La surabondance des ongulés
5. Les stratégies mises en place face au changement climatique
    5.1. La stratégie d'atténuation
    5.2. La stratégie d'adaptation
6. Les actions du propriétaire forestier
7. En synthèse
8. En savoir plus

La situation de la Forêt dans le Monde

Les océans couvrent plus de 70% de la surface de la planète.

Les forêts couvrent, quant à elles, 31% des terres émergées dans le Monde soit environ 4 milliards d’hectares et à peu près 9% de la surface terrestre.

1/3 de cette surface est une forêt primaire (sans trace d’activité humaine). A l’inverse 7% est constituée de surface forestière plantées par l’homme.

La forêt est principalement située dans les zones tropicales (45%) et boréales (27%). Plus de la moitié est située dans 6 pays : Russie, Brésil, Canada, Etats-Unis, Chine et République Démocratique du Congo.

Pour rappel, la surface de la forêt française est de 17 millions d’hectares en métropole et de plus de 8 millions d’hectares dans les départements et régions d’Outre-Mer (dont 8 millions pour la seule Guyane). On estime que la surface de la forêt française progresse de l’ordre de 85 000 hectares par an.

Par ailleurs, 6,4% de la surface mondiale est couverte par des terres arables soit 3,3 milliards d’hectares. Et sur cette surface « agricole », seulement 1,5 million d’hectares sont effectivement cultivés mais sont en diminution constante à cause de la croissance démographique ou de dégradations. On estime ainsi que 60% des sols cultivables subissent des dégâts léger ou sévères (érosion, surpâturage, atteinte de la structure des sols, salinisation, acidification, pollution, artificialisation). Ce problème de l'agriculture n'est pas dénué de liens avec la forêt comme nous le verrons plus loin.

Le changement climatique

Les émissions de Gaz à Effet de Serre

Les éléments suivants sont issus du dernier rapport du GIEC paru en 2023. L'importance du changement climatique n'est plus contestable.

La température mondiale a progressé de plus d'1 degré Celsius depuis l'ère préindustrielle. Ce réchauffement a de multiples conséquences que nous pouvons tous constater : fonte des glaciers et de la banquise, montée des eaux, ... Et sont à l'origine de l'augmentation de fréquence d'épisodes climatiques extrêmes : tempêtes, ouragans, canicules, sècheresses, inondations, ... avec les drames humains et économiques qui les accompagnent.

C'est la conséquence de la forte augmentation des émissions de Gaz à Effet de Serre (principalement le dioxyde de carbone et le méthane) dans l'atmosphère qui proviennent à 80% du charbon, du pétrole et du gaz consommé par l'activité humaine.

La forêt est au cœur des enjeux et de la réflexion sur la lutte contre le changement climatique car elle peut être à la fois une des causes du dérèglement climatique et une des solutions.

La déforestation

La déforestation nette (= déforestation – plantation) qui était de 6.8 millions d’hectares par an entre 2000 et 2010 s’est réduit de 3,1 millions d’hectares entre 2010 et 2018. Elle concerne principalement l’Amérique du Sud et l’Afrique dans les zones tropicales.

Cette déforestation est principalement due (50%) à l’expansion des terres cultivées (dont 7% pour la seule huile de palme) et au pâturage du bétail (38%).

La déforestation entraine une libération de CO2 dans l'atmosphère et joue un rôle non négligeable dans le réchauffement climatique.

Les services environnementaux de la forêt

Les forêts ont un rôle majeur à jouer pour atténuer l'impact du réchauffement climatique grâce à leurs caractéristiques.

L'absorption du carbone

Les arbres sont constitués de 20% de carbone (C) qu'ils stockent lors de la photosynthèse en absorbant du dioxyde de carbone (CO2) dans l'air et en rejetant de l'oxygène (O). C'est le mécanisme de "séquestration" ou "piégeage" du carbone.

Le stockage du carbone

arbreLe carbone qui est absorbé est ensuite stocké à la fois dans le tronc, les branches mais également dans le sol par la chute puis par la décomposition des branches, des feuilles, ... C'est le phénomène qui est appelé "puits de carbone". Ce serait ainsi plus de 1 000 milliards de tonnes de carbone qui serait ainsi stocké dans le sol, soit plus de 2 fois la quantité présente dans l'air.

L'ONF estime que la forêt française stocke ainsi chaque année 63 millions de tonnes de CO2 soit 20% du volume de ses émissions de GES.

Le cycle de l'eau et la régulation du climat

La présence des forêts permet d'entretenir le cycle de l'eau et protège de nombreuses régions du globe de la désertification.

Très schématiquement, l'eau de pluie s'écoule des sols vers les océans. L'évaporation des océans génère des nuages qui génèrent à leur tour des pluies sur les océans et à proximité.Paysage de forêts avec océan et nuages
La présence de forêts permet de stocker de l'eau dans les sols.
L'évapotranspiration des forêts génère également des nuages. Ces nuages entrainent à leur tour des pluies dans les zones voisines de ces massifs forestiers. Ce sont des zones qui sont quelquefois trop lointaines des océans et qui n'auraient autrement que peu de précipitations et seraient donc arides ou désertiques sans la présence des forêts.

Par ailleurs, le sol des forêts permet de stocker l'eau et de la filtrer jusqu'aux nappes phréatiques. La présence d'étangs, ruisseaux et rivières est donc à préserver.

Enfin, la présence des arbres, toujours par ce phénomène d'évapotranspiration, permet également de réduire fortement la température de l'air.

L'alimentation et la santé

Les forêts sont une source d'alimentation et de produits, voire de médicaments, bénéfiques pour la santé.

Le développement de l'agroforesterie prouve que la forêt peut participer à la régénération de sols agricoles pollués et contribuer à alimenter la population dans le cadre de la transition agroécologique.
Ecureuil le long d'un arbre

La biodiversité

Les bois et forêts, et plus particulièrement les forêts tropicales et primaires, abritent la plus grande biodiversité animale et végétale au monde. L'essentiel de cette richesse nous est encore inconnu et doit être préservé pour les générations futures.

 

Un matériau de construction durable

Le bois est un matériau de construction écologique qui, contrairement au béton, n'émet que très peu de CO2. C'est d'ailleurs la raison pour laquelle de nombreuses opérations de promotions immobilières recourent désormais à ce matériau pour atteindre leurs objectifs de réduction d'émission dans le secteur de l'immobilier.

Il faut d'ailleurs noter que le bois est un matériau léger et résistant, notamment face au feu (vitesse de propagation relativement réduite). Il est durable dans le temps et apporte une bonne isolation thermique naturelle.
De plus, il peut être utilisé pour la charpente, les murs et le mobilier.

Il est par contre essentiel que la ressource en bois soit issue de forêts gérées de façon durable (certification PEFC et FSC notamment)

Une énergie renouvelable

Le bois, lors de sa combustion, va restituer autant de carbone qu'il en a stocké. Il est donc émetteur de CO2 mais est pour autant considéré comme une énergie verte.

En effet, dès lors qu'il est issu d'une forêt gérée durablement, les coupes de bois sont compensées par la croissance de nouveaux arbres qui vont capter du CO2 dans l'air. C'est notamment largement le cas en France ou la surface de la forêt française continue de croitre.

Il est toutefois nécessaire d'utiliser des systèmes de chauffage performants tant en termes de calories qu'en termes de filtrage des particules fines.

La forêt menacée par le changement climatique

Pour que la forêt puisse pleinement contribuer à lutter contre le changement climatique, il faut qu'elle soit en capacité de répondre aux risques qui la menacent.

La déforestation et les feux de forêts

La destruction de la forêt (incendie, déforestation, ...) contribue au relâchement de carbone dans l'atmosphère et contribue donc au réchauffement climatique. Par exemple, les incendies au Canada en 2023, qui ont touché 12 millions d'hectares, auraient rejeté de l'ordre de 1 100 mégatonnes de CO2 (soit 1,1 milliard de tonnes) au 31 juillet, soit plus que le total des émissions annuelles du pays en 2019 et 2020.Forêt en feu

En Europe en 2022, 780 000 hectares de forêt sont partis en fumée et ont émis 9 millions de tonnes de CO2.

La déforestation en Amazonie et en Indonésie empêche également ces 2 régions de jouer leur rôle de puits de carbone ces dernières années.

Il est donc nécessaire de stopper cette déforestation et d'accélérer la reforestation là où elle est envisageable (sans pour autant supprimer des terres agricoles nécessaires à l'alimentation). Et de protéger autant que possible les forêts contre les incendies qui les déciment.

Les nuisibles et les maladies

La mortalité des arbres est en forte augmentation : +80% en France entre 2005/2013 et 2013/2021. C'est d'une part la conséquence des incendies mais également d'un ralentissement de la croissance ou d'un dépérissement résultant d'épisodes de sécheresse.

Le réchauffement climatique et les périodes de sécheresse ont également entrainé une forte augmentation des dégâts liés aux insectes ravageurs et aux maladies. Châtaigniers, frênes et épicéas sont ainsi les principales victimes d'une prolifération d'insectes agressifs et de nouveaux champignons.

Cette mortalité ralentit fortement le mécanisme de puits de carbone de la forêt française.

La surabondance des ongulés

Enfin, selon l'ONF, la présence trop importante de cerfs, chevreuils et sangliers porte également atteinte à la croissance des jeunes arbres et donc au stockage du carbone. Elle recommande ainsi un développement de la chasse dans certains territoires afin de limiter les conséquences de cette surpopulation.

Les stratégies mises en place face au changement climatique

La stratégie d'atténuation

Pour réduire le changement climatique, la 1ère stratégie à mettre en place est la réduction des gaz à effet de serre, c'est à dire une stratégie d'atténuation.

Il convient donc de réduire la déforestation et la dégradation de la forêt. Ce qui permettra d'améliorer le puits de carbone.

La stratégie d'adaptation

Par ailleurs, certains effets du réchauffement climatique sont désormais définitivement engagés (fonte des banquises et des glaciers, ...). Face à cette situation, il faut mettre en place des actions pour limiter la vulnérabilité de la forêt et des populations qui en dépendent. Il faut donc s'adapter en adaptant la gestion de la forêt par la plantation de nouvelles essences, par des mesures de prévention face aux incendies, …

Les actions du propriétaire forestier

Si vous êtes propriétaire forestier ou si vous aspirez à le devenir, vous devez impérativement tenir compte du changement climatique.

L'ONF préconise par exemple le concept de la "forêt mosaïque" dont le principe repose sur une forte diversification des essences et des modes de gestion très diversifiés à l'intérieur d'une même forêt. Ou c'est possible, il convient de privilégier une régénération naturelle plutôt que par des plants.Dessin de la forêt mosaïque

La production de bois ne peut plus être le seul objectif de la gestion forestière.

Il faudra plus que jamais être attentif à la croissance de ses arbres et à l'apparition d'éventuelles maladies.

Des mesures préventives sont également à mettre en place dans le cadre de la prévention des incendies : entretien des allées forestières, mise en place d'allées coupe-feu, débroussaillement autour des habitations et de voiries, …

En synthèse

Le changement climatique est désormais inéluctable. Seule son ampleur reste à déterminer et dépendra des mesures qui seront prises tant par les états que par les citoyens.

La forêt représente une opportunité qui peut permettre de limiter le réchauffement climatique. Mais, sans une gestion appropriée, elle peut au contraire l'accentuer en rejetant du carbone dans l'atmosphère.

Il faut donc limiter au maximum la destruction de la forêt (par la déforestation, les feux de forêts ou les maladies), et lui donner au contraire les moyens de jouer son rôle de puits de carbone et de réserve de biodiversité.

Chaque propriétaire forestier a, à son niveau, les moyens d'influer sur son territoire en adaptant sa gestion à cette nouvelle situation et en mettant en place des actions de prévention contre les incendies. Il doit donc adapter le mode de gestion de la forêt et s'appuyer sur les compétences des experts forestiers et syndicats de propriétaires forestiers.

En savoir plus :