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Vendre une exploitation agricole – Le guide complet

Publié le September 16, 2024 par Bernard Charlotin
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Vendre une exploitation agricole – Le guide complet

La vente de son exploitation agricole est une étape importante dans la vie d’un agriculteur. Et surtout une démarche génératrice de beaucoup de stress pour un vendeur.

Etat des lieux de tous les éléments importants et réponse aux questions les plus fréquentes pour transmettre sa ferme : Quand faut-il mettre en vente, comment préparer son exploitation, trouver un acquéreur, vendre les actifs ou les parts de votre société, louer ou vendre le foncier, ...

Sommaire
1. Quel est le bon moment pour vendre ?
2. Comment préparer son exploitation pour la vente ?
3. Quel délai pour vendre une exploitation agricole
4. L’évaluation des biens à vendre
5. Vendre ou louer ?
    5.1 Louer ou vendre le foncier
    5.2 Louer ou vendre les bâtiments agricoles
    5.3 Louer ou vendre la maison d’habitation
6. Trouver un acquéreur
7. Quelle fiscalité lors de la cessation d’activité
8. Les diagnostics à réaliser
9. Le compromis de vente
10. Vendre les actifs ou les parts de votre société
11. En conclusion

Quel est le bon moment pour vendre ?

C’est une question qui nous revient très souvent. Si la conjoncture en agriculture peut influer le prix de vente et la rapidité de la transaction, il est extrêmement difficile de définir un bon moment pour mettre son entreprise agricole en vente.

La conjoncture peut en effet se retourner entre le moment de mise en vente et le début de la négociation avec un acquéreur. Si la conjoncture est favorable, la tentation peut être forte de surévaluer certains actifs ce qui fera fuir des acquéreurs.

Nos années d’expérience dans l’accompagnement de vendeurs nous ont appris que le bon moment pour vendre est celui ou le vendeur est réellement prêt à vendre. Et ceci pour plusieurs raisons.

La vente par opportunisme (« je vends si je trouve un acquéreur au bon prix ») est souvent une mauvaise stratégie. Un prix affiché trop élevé peut faire peur aux acquéreurs et donner une mauvaise image de l’exploitation. Une image qui collera longtemps à l’exploitation car le milieu agricole est assez petit et les informations y circulent rapidement. Il sera alors difficile de changer cette image même si le prix est revenu au niveau du marché.

Mettre en vente trop tôt est également une mauvaise stratégie. Cette démarche a souvent l’effet contraire à l’objectif recherché :

  • Des acquéreurs intéressés par votre propriété vous contactent mais renoncent au regard du prix demandé.
  • Le bien est affiché longtemps sur différents sites et devient connu des acquéreurs. La propriété ne se vendant pas, les acquéreurs considèrent qu’outre son prix de vente excessif elle doit avoir des défauts importants
  • Lorsque vous approchez de vos dates objectives de vente, vous réduisez le prix demandé mais les acquéreurs échaudés ne reviendront pas et la réputation de prix excessif reste malgré tout attachée à votre bien
  • Vous devez en fin de compte réduire le prix de vente bien au-delà de sa valeur réelle sur le marché pour réaliser une vente

Vous risquez donc, en démarrant trop tôt, de vendre finalement plus tard et à un moins bon prix qu’espéré.

Lorsque le vendeur n’est pas réellement prêt à vendre, la négociation est le plus souvent très difficile en présence d’un acquéreur sérieux. Or, la négociation fait partie intégrante de la vente : Refuser toute négociation, c’est en réalité refuser la vente.

Un vendeur doit donc accepter l’arrêt futur de son activité agricole et se projeter dans sa future nouvelle vie au moment de la mise en vente. Ce n’est pas toujours facile et par exemple dans un couple ou une société, les parties ne sont pas obligatoirement prêtes au même moment ce qui peut générer de fortes tensions.

Comment préparer son exploitation pour la vente ?

Pour réussir sereinement votre projet de transmission, une bonne préparation est nécessaire.

Voici une liste rapide de questions à se poser sur les principaux points à étudier :

  • Financier :
    • Quels seront mes revenus après la vente
    • Quel sera ma pension de retraite
    • A quelle date aurai-je une retraite à taux plein
    • Quel sera l’impôt à payer lors de ma cessation d’activité
    • Quel sera mon capital disponible après la vente
  • Juridiques
    • Y a-t-il des bâtiments construits sur le sol d’un tiers
    • Y a-t-il des indivisions ou démembrement de propriété
    • Mes propriétaires accepteront-ils de transmettre leur foncier à mes repreneurs
  • Ou même paysagers :
    • Comment donner envie à un candidat à l’achat de reprendre ma ferme ?
    • Faut-il ranger, nettoyer, réparer les bâtiments, matériels, …
    • Faut-il réaliser des aménagements paysagers, revoir les voies d’accès et de circulation, …

En complément :

Quel délai pour vendre une exploitation agricole

Combien de temps faut-il pour vendre une exploitation agricole ? C’est une des questions que se posent tous les vendeurs.

La durée minimale sera de l’ordre de 6 mois entre le moment ou la propriété est mise en vente et le moment ou la vente définitive peut être signée.

En effet, la 1ère étape est de trouver un candidat puis de trouver un accord avec cet acquéreur. Et s’assurer de la faisabilité du financement du projet. Difficile de compter moins d’un mois pour y arriver avec une durée moyenne de 6 à 8 mois qui peut prendre jusqu’à une année, voire plus.

En effet, il faut souvent attendre 2 mois pour obtenir un accord de financement après le dépôt de la demande de financement nécessitant la réalisation préalable d’une étude économique (2 à 3 mois de délai).

Il faut ensuite rédiger un compromis de vente et le signer. Il faut compter au minimum également 1 mois pour cette phase avec une durée moyenne de 2 mois.

On rentre ensuite dans les démarches administratives de la vente. Le notaire doit notifier le projet de vente à la SAFER qui dispose d’un délai de 2 mois pour prendre sa décision. Il faut également déposer une demande d’autorisation d’exploiter au titre des structures. Procédure qui prend au minimum 4 mois mais qui peut s’allonger selon le temps nécessaire pour informer les propriétaires. Sans parler du risque de prorogation du délai de 2 mois. Il faut donc compter au minimum 4 mois de délai avec un délai moyen de 6 mois.

Il reste ensuite au notaire à rédiger son acte définitif, à obtenir le déblocage des financements en contrepartie des garanties et à fixer les rendez-vous de vente. Cette démarche peut être couverte par les autres délais ou prendre 2 mois complémentaires.

Dans le cas ou l’acquéreur sollicite les aides à l’installation, le temps nécessaire à la validation du Projet Personnel Professionnel (PPP) et du Plan d’Entreprise (PE), est au minimum de 1 an. L’impact sur la durée de la vente dépendra de l’avancée du candidat dans ces démarches préalablement à son projet d’achat.

En synthèse, voici les délais que vous pouvez envisager pour la réalisation d’une vente d’exploitation agricole :

Etapes

Durée minimale

Durée moyenne

Durée longue

Trouver l’acquéreur

1 mois

3-6 mois

18 mois

Obtention du financement

1 mois

3 mois

3 mois

Signature compromis

1 mois

2 mois

6 mois

Démarches administratives

4 mois

6 mois

8 mois

Signature acte authentique

Inclus

1 mois

2 mois

Durée totale

6 mois

15 à 18 mois

36 mois

Il s’agit bien entendu d’estimations, chaque projet étant particulier.

Il faut également noter que dans certaines situations, la cession de parts de sociétés peut permettre d’accélérer sensiblement certains délais.

En synthèse, compte tenu des délais moyens pour réaliser une vente, vous devez rendre public votre projet de cession entre 12 et 18 mois avant la date optimale.

L’évaluation des biens à vendre

Nous consacrons plusieurs articles spécifiques aux modalités d’évaluation que nous vous invitons à consulter pour approfondir le sujet.

De manière synthétique, voici quelques éléments.

Il existe plusieurs méthodes d’évaluation :

  • Patrimoniale : en additionnant la valeur de chacun des éléments qui composent l’exploitation (foncier, bâtiments, matériel, cheptel, stocks, maison d’habitation, …)
  • Economique : on reconstitue une valeur globale de l’exploitation en partant de sa rentabilité. Le calcul peut se faire à partir du résultat comptable ou de l’excédent brut d’exploitation

Le recours à une méthode plutôt qu’à une autre se fait au cas par cas.

Si votre exploitation peut faire l’objet d’une cession de chacun des éléments séparément, la méthode patrimoniale sera privilégiée. Si ceci parait assez simple pour le foncier, la maison, le matériel, … il sera en revanche beaucoup plus difficile de déterminer une valeur vénale d’un bâtiment agricole seul surtout s’il contient des installations très spécialisées qui ne sont pas utilisables pour un projet différent.

A l’inverse, si une cession élément par élément n’est pas envisageable, c’est la valeur de rentabilité qui sera privilégiée

Les experts en charge d’une évaluation recourent le plus souvent à évaluation patrimoniale et économique et réalisent ensuite une valorisation globale en proratisant les 2 méthodes.

Le prix de mise en vente peut différer de l’évaluation que ce soit au choix du vendeur ou pour se conserver une marge de négociation. Celle-ci doit être faible et ne pas excéder 10%. Au-delà, le prix affiché risque de faire fuir des acquéreurs pourtant motivés.

En complément :

Vendre ou louer ?

Lors de la transmission de votre exploitation agricole, vous pouvez tout à fait envisager de vendre ou de louer tout ou partie de l’exploitation qu’il s’agisse des terres, de la maison d’habitation ou des bâtiments agricoles.

C’est une question complexe avec des avantages et des inconvénients pour chaque situation.

Louer ou vendre le foncier

Les avantages de la location :

  • Percevoir des revenus complémentaires
  • Capitaliser sur une valorisation du prix des terres
  • Outil de transmission du patrimoine

Les inconvénients de la location :

  • Difficulté de la revente
  • Risque de décote en cas de revente
  • Faiblesse des loyers agricoles
  • Risque de perte de valeur par rapport à l’inflation

Louer ou vendre les bâtiments agricoles

Les avantages de la location :

  • Les avantages de la location du foncier
  • Faciliter la vente de la ferme en réduisant le montant à acheter par le candidat

Les inconvénients de la location :

  • Les inconvénients de la location du foncier
  • Risque de perte de valeur en cas de mauvais entretien
  • Risque de sous-investissement par le locataire
  • Indemnité d’amélioration à verser au locataire en fin de bail sur les améliorations apportées

Louer ou vendre la maison d’habitation

Les avantages de la location du corps de ferme :

  • Les avantages de la location du foncier et des bâtiments agricoles
  • Capitaliser sur une valorisation du prix de l’immobilier

Les inconvénients de la location :

  • Les inconvénients de la location du foncier et des bâtiments agricoles
  • Risque de devoir réaliser des travaux pour les normes énergétiques, de décence
  • Montant du loyer pouvant dépendre des baux ruraux (plafonnés) et pas des baux d’habitation (libres)

Nous vous invitons à lire notre article complet sur ces 2 alternatives

En complément :

Trouver un acquéreur

La recherche de l’acquéreur qui reprendra votre ferme n’est pas toujours chose aisée. Il faut tout d’abord avoir à l’esprit que la majorité des transmissions se font dans un cadre local, dans votre réseau ou par le biais de relations :

  • Cadre familial : enfant, neveu ou nièce, …
  • Voisin ou parent de voisins
  • Salariés et stagiaires
  • Relationnel local

Outre l’inscription auprès du Répertoire Départ Installation (après le remplissage du formulaire DICAA), vous pouvez également prendre contact avec des agences spécialisées en transactions d’exploitations agricoles, publier une annonce sur un portail d’annonce comme www.ma-propriéte.fr, …

En complément :

Quelle fiscalité lors de la cessation d’activité

Nous y consacrons un article spécifique car c’est un vaste sujet. L’impôt à payer lors de votre cessation d’activité dépendra bien entendu de votre situation personnelle.

Il y a beaucoup d’éléments à prendre en compte et notamment :

  • La durée du dernier exercice comptable
  • L’imposition ou l’exonération des plus-values
  • La réintégration de dispositifs fiscaux antérieurs
  • La présence de bénéfice sur les stocks

Nous vous conseillons de vous rapprocher de votre cabinet comptable afin de connaître précisément votre situation et voir de quelle manière il est possible de modifier les modalités de votre cession pour réduire l'impôt sur le revenu lors de votre arrêt d'activité.

En complément :

Les diagnostics à réaliser

Voici la liste des diagnostics à réaliser pour la vente d’une maison d’habitation :

Diagnostic

Type de bien

Durée de validité

Loi Carrez

Bien en copropriété

Illimitée en l’absence de travaux

DPE

Bien clos couvert et chauffé

10 ans sauf travaux

Plomb

Bien construit avant le 1er janvier 1949

1 an ou illimité si absence de plomb

Termites

Bien situé dans une zone déclarée à risques

6 mois

ERP/ERNMT

Bien situé dans une zone déclarée à risques

6 mois

Amiante

Bien construit avant le 1er juillet 1997

Illimité si absence d’amiante

Gaz

Installations de plus de 15 ans

3 ans

Electricité

Installations de plus de 15 ans

3 ans

Assainissement

Biens pour la vente en fonction de la zone géographique

3 ans

Le diagnostic DPE est le seul qui est obligatoire lors de la mise en vente (annonces immobilières), les autres diagnostics devant être effectués au plus tard avant la signature de l’acte définitif de vente.

Nous vous conseillons toutefois de les réaliser en une seule fois. D’une part, vous pourrez obtenir un tarif d’ensemble plus avantageux. D’autre part, vous pourrez apporter une information claire à votre acquéreur et éviter le risque d’une renégociation ultérieure.

Dans le cadre de la vente de votre propriété agricole, vous serez sans doute obligé de fournir ou de réaliser d’autres diagnostic notamment ceux qui sont obligatoires dans le cadre de votre activité professionnelle.

C’est ainsi le cas :

  • Dossier technique amiante pour les bâtiments agricoles construits avant le 1er juillet 1997
  • Diagnostic des installations électriques (obligatoire en présence de salariés ou d’une Installation Classée)
  • Contrôle des appareils de levage (obligatoire en présence de salariés)
  • Contrôle des pulvérisateurs (obligatoire tous les 3 ans)

Par ailleurs, d’autres contrôles ou vérifications peuvent vous être demandés afin de sécuriser les parties :

  • Contrôle de l’état sanitaire du cheptel
  • Contrôle de la conformité des matériels agricoles

Si ces contrôles ont un coût et prennent du temps, ils permettent toutefois de lever le risque de responsabilité du vendeur en cas d’accident postérieur à la cession.

Le compromis de vente

C’est la phase essentielle dans le processus de vente car c’est l’engagement irrévocable du vendeur et de l’acquéreur de réaliser la vente aux conditions convenues.

L’acte contiendra bien entendu des conditions suspensives quelles soient légales (obtention du financement), administratives (obtention de l’autorisation d’exploiter) ou purement contractuelles (signature de baux par les propriétaires, …).

Ce contrat doit être rédigé par un spécialiste qui saura intégrer toutes les clauses spécifiques liées à une exploitation agricole (transfert de DPB, contrats salariés, autorisations administratives, contrôles et diagnostics, …).

Si l’obtention du financement bancaire fait généralement l’objet d’une condition suspensive légale, nous vous conseillons toutefois d’obtenir des accords de financement de la part de banques avant de signer ce contrat.

En effet, en cas d’échec de financement postérieur à la signature du compromis, vous aurez perdu de nombreux mois, engagé des démarches administratives ou avec des propriétaires. Et vous aurez peut-être raté pendant ce délai un autre acquéreur finançable.

En complément :

Vendre les actifs ou les parts de votre société

Si vous réalisez votre activité agricole dans le cadre d’une société (EARL, GAEC, SCEA, …), vous vous poserez la question de savoir si vous devez vendre les titres de votre société ou vendre les actif de la société.

Il est généralement plus complexe de procéder à une cession de parts sociales (ou d’actions) d’une société que de procéder à une vente d’actif.

Il faut en effet déterminer la valeur exacte de tous les actifs et de tous les passifs de la société au jour du transfert. Une valeur provisoire est généralement définie. Puis, sur la base du bilan comptable au jour de la vente, une valorisation définitive est ensuite réalisée avec une régularisation des paiements.

Il faut également tenir compte du risque pesant sur les biens et les engagements de la société à travers une Garantie d’Actif et de Passif. Un élément clé à négocier.

Enfin, la fiscalité pour le vendeur peut être très différente selon qu’il vend des titres ou des actifs.

Dernier point, si le recours a des sociétés a été fréquent par le passé notamment pour éviter le droit de préemption de la SAFER, la mise en place de la Loi Sempastous a fortement remis en cause ces pratiques.

S’il n’existe pas de règles générales, il faut avant tout éviter d’imposer les modalités de la cession à un acquéreur (pour lequel la situation est souvent défavorable) mais plutôt retenir la solution qui sera la plus intéressante pour le vendeur et pour l’acquéreur.

En complément :

En conclusion

C’est un long parcours à réaliser entre la prise de décision de vendre et la vente définitive. Beaucoup de choix à faire sont complexes et nécessite un accompagnement de qualité que ce soit avec votre cabinet comptable ou un cabinet spécialisé dans les transmissions agricoles.

Pour aller plus loin, nous vous proposons un ensemble d’articles plus pointus qui sauront réponde, nous l’espérons, à vos besoins.