Agricole   

Quel impôt pour les agriculteurs ?

Publié le September 5, 2024 par Bernard Charlotin
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Quel impôt pour les agriculteurs ?

La fiscalité des revenus agricoles en France est un sujet complexe, avec plusieurs régimes d'imposition qui s'appliquent selon la taille de l'exploitation et les choix fiscaux des agriculteurs. Cet article explore les principaux régimes fiscaux et les options disponibles pour les agriculteurs. Un élément indispensable à connaitre avant de se lancer dans l'achat d'une exploitation agricole.

Sommaire : 
1. Le régime Micro BA
2. Le Bénéfice Réel
    2.1 Le bénéfice réel simplifié
    2.2 Le bénéfice réel normal
    2.3 Le rattachement des revenus accessoires au bénéfice agricole réel
    2.4 Les options et particularités fiscales
3. L'impôt sur les sociétés
4. L'exonération de CFE
5. En conclusion
6. En savoir Plus :

Le régime Micro BA

Le régime Micro Bénéfices Agricoles (Micro BA), qui a remplacé le régime du forfait agricole, s'applique aux exploitations dont la moyenne des recettes hors taxes sur les trois dernières années n'excède pas un certain seuil, fixé à 120 000 euros pour l'imposition des revenus à compter de 2024.

Ce régime simplifié permet de calculer le bénéfice imposable en appliquant un abattement forfaitaire de 87% sur les recettes, simplifiant ainsi la déclaration fiscale des petites exploitations.

Ce régime est uniquement ouvert aux personnes physiques et pas pour les personnes morales (sociétés) qui doivent obligatoirement se soumettre à une comptabilité au Bénéfice Réel.

Le Bénéfice Réel

Pour les exploitations dont les recettes dépassent le seuil du régime Micro BA, ou pour celles qui choisissent volontairement ce régime, le bénéfice réel s'applique. Ce régime se décline en deux options : le bénéfice réel simplifié et le bénéfice réel normal.

Contrairement au micro-BA, l’éventuel déficit sera déductible des autres revenus (avec un plafond à respecter) ou sera reportable.

Le bénéfice réel simplifié

Le régime du bénéfice réel simplifié est accessible aux exploitations dont les recettes annuelles excèdent 120 000 euros et ne dépassent pas 352 000 euros. Ce régime permet une comptabilité simplifiée, tout en calculant le bénéfice imposable à partir des créances acquises et des dépenses engagées.

Avantages du bénéfice réel simplifié

  • Comptabilité simplifiée : Bien que plus complexe que le régime Micro BA, ce régime reste plus simple que le bénéfice réel normal.
  • Prise en compte des charges réelles : Les agriculteurs peuvent déduire leurs charges réelles, ce qui est avantageux pour ceux ayant des coûts de production élevés.

Limites du bénéfice réel simplifié

  • Plafond de recettes : Les exploitations dépassant ce plafond doivent passer au régime du bénéfice réel normal.
  • Pas de réelle économie : le caractère « simplifiée » de la comptabilité ne permet pas de réaliser une réelle économie de coût de comptabilité par rapport au bénéfice réel normal.

Le bénéfice réel normal

Le régime du bénéfice réel normal s'applique aux exploitations dont les recettes dépassent le plafond du régime simplifié. Ce régime impose une comptabilité complète et détaillée, similaire à celle des entreprises industrielles et commerciales.

Il est bien entendu possible d’opter pour le régime du Bénéfice Réel Normal en deçà du seuil de 352 000 € de recettes.

Avantages du bénéfice réel normal

  • Précision fiscale : Permet une gestion fine des charges et des recettes, optimisant ainsi l'imposition.
  • Adaptabilité : Convient aux grandes exploitations avec des structures complexes.

Limites du bénéfice réel normal

  • Complexité administrative : Exige une comptabilité exhaustive, ce qui peut être coûteux et chronophage.
  • Risque d'erreurs : La complexité augmente le risque d'erreurs comptables, pouvant entraîner des redressements fiscaux.

Le rattachement des revenus accessoires au bénéfice agricole réel

Le régime du bénéfice agricole réel offre aux exploitants agricoles la possibilité de rattacher certains revenus accessoires à leur bénéfice agricole principal, sous certaines conditions. Cette option peut simplifier considérablement la gestion fiscale des exploitations diversifiées.

Conditions de rattachement

Pour pouvoir rattacher les revenus accessoires au bénéfice agricole, deux conditions cumulatives doivent être respectées :

  1. Plafond de recettes : Les recettes accessoires de l'année civile ne doivent pas dépasser 100 000 € TTC.
  2. Proportion des recettes : Ces recettes accessoires ne doivent pas excéder 50% des recettes tirées de l'activité agricole.

Ces seuils s'apprécient en faisant la moyenne des recettes accessoires et agricoles sur les trois années précédentes ou sur la durée d'activité si elle est inférieure à trois ans.

Types d'activités concernées

Les activités accessoires pouvant bénéficier de ce rattachement sont principalement :

  • Les activités commerciales (tourisme à la ferme, vente de produits non issus de l'exploitation)
  • Les activités artisanales (transformation de produits)
  • Les activités non commerciales (prestations de services)

Il est important de noter que certaines activités, comme la production d'électricité photovoltaïque, bénéficient de règles spécifiques et peuvent être rattachées au bénéfice agricole sans condition de seuil.

Avantages du rattachement

Le rattachement des revenus accessoires au bénéfice agricole présente plusieurs avantages :

  • Simplification administrative : Un seul régime fiscal à gérer
  • Optimisation fiscale : Possibilité de compenser les résultats entre activités
  • Maintien des avantages fiscaux agricoles : Application des dispositifs spécifiques au secteur agricole (moyenne triennale, déductions pour investissement et pour aléas)

Limites et précautions

Malgré ses avantages, le rattachement des revenus accessoires nécessite quelques précautions :

  • Suivi comptable distinct : Il est nécessaire de tenir une comptabilité séparée pour les activités accessoires afin de pouvoir justifier les montants en cas de contrôle.
  • Vigilance sur les seuils : Un dépassement des seuils peut entraîner la remise en cause du rattachement et des complications fiscales.
  • Impact sur certains dispositifs : Certains mécanismes fiscaux, comme la DPA (Déduction Pour Aléas), ne s'appliquent pas aux revenus accessoires même rattachés.

En conclusion, le rattachement des revenus accessoires au bénéfice agricole réel peut être une option intéressante pour de nombreux exploitants, mais elle nécessite une analyse approfondie de la situation de l'exploitation et un suivi rigoureux pour en tirer pleinement parti tout en respectant les règles fiscales en vigueur.

Les options et particularités fiscales

Les agriculteurs peuvent bénéficier de nombreux dispositifs fiscaux spécifiques qui peuvent réduire leur charge fiscale :

La moyenne triennale fiscale : Ce dispositif permet de lisser les revenus imposables sur trois ans, réduisant ainsi l'impact des fluctuations annuelles importantes. Cela est particulièrement utile pour les exploitations soumises à des aléas climatiques ou de marché.

La Déduction pour Épargne de Précaution (DEP) : La DEP autorise les exploitants à constituer une épargne défiscalisée pour faire face aux aléas. Ce mécanisme encourage la gestion prudente et la résilience financière des exploitations.

Crédit d’impôt pour remplacement : Un crédit d'impôt est accordé pour les dépenses engagées pour le remplacement de l'exploitant pendant les congés.

Le taux du crédit d’impôt est de 50% à 60% des dépenses de remplacement supportées.

Cela permet aux agriculteurs de prendre des congés sans subir une charge fiscale supplémentaire.

L’abattement sur le bénéfice des jeunes agriculteurs : Un abattement fiscal est accordé pendant cinq ans pour encourager l'installation des jeunes agriculteurs. L’abattement est le suivant :

  • 75% lorsque le bénéfice de l'exercice est ≤ à 45 100 €,
  • 50% pour la fraction du bénéfice ≤ à 45 100 €,
  • 30% pour la fraction du bénéfice > à 45 100 € et ≤ à 60 100 €.

Avec une règle spécifique pour le 1er exercice.

L’exonération des plus-values professionnelles : Les plus-values réalisées lors de la cession d'éléments de l'actif immobilisé peuvent être exonérées sous certaines conditions, notamment si l'exploitant part à la retraite.

C’est également le cas pour les petites entreprises (article 151 septies du CGI) dont les plus-values sont exonérées totalement si les recettes annuelles de l’exploitation sont inférieures à 350 000 € et partiellement entre 350 000 € et 450 000 €.

La déduction fiscale pour les valorisations des stocks de vaches : Une déduction de 150 euros par vache est accordée pour compenser l'augmentation de la valeur des stocks bovins de plus de 10%. La déduction est réintégrée au résultat lorsque l’animal est vendu ou au bout de 6 ans, sauf remplacement de l’animal par un autre dans les stocks.

Cette mesure permet de reporter l’imposition sur la croissance d’un cheptel bovin au moment de la vente des animaux.

Il existe de nombreuses autres mesures et notamment : le crédit d’impôt pour les exploitations certifiées HVE, le crédit d’impôt pour frais de comptabilité, …

L'impôt sur les sociétés

Les exploitations agricoles peuvent opter pour l'impôt sur les sociétés (IS) si elles sont constituées sous forme de sociétés. Cette option peut être avantageuse pour certaines exploitations, notamment en raison de la possibilité de déduire les salaires versés aux dirigeants et aux associés, réduisant ainsi la base imposable.

Avantages de l'impôt sur les sociétés

  • Déduction des salaires : Permet de réduire la base imposable en déduisant les salaires des dirigeants.
  • Taux d'imposition potentiellement plus bas : Selon le niveau de bénéfice, le taux d'IS peut être plus avantageux que l'impôt sur le revenu.

Limites de l'impôt sur les sociétés

  • Complexité fiscale : Nécessite une gestion fiscale plus complexe, souvent avec l'aide d'un expert-comptable.
  • Distribution des bénéfices : Les dividendes versés aux associés sont soumis à l'impôt sur le revenu, ce qui peut entraîner une double imposition.

L'exonération de CFE

Les exploitants agricoles bénéficient d'une exonération de la Cotisation Foncière des Entreprises (CFE) en vertu de l'article 1450 du Code Général des Impôts. Cette exonération s'applique aux exploitants individuels et aux sociétés civiles agricoles, sauf pour certaines activités spécifiques comme la production de graines et semences.

En conclusion

La fiscalité des revenus agricoles en France offre une variété de régimes et d'options qui peuvent être adaptés aux besoins spécifiques des exploitations. Les agriculteurs doivent évaluer soigneusement leurs options fiscales pour optimiser leur imposition, tout en tenant compte des particularités de leur exploitation et des fluctuations du marché. Une bonne gestion fiscale peut non seulement réduire la charge fiscale, mais aussi renforcer la résilience financière de l'exploitation agricole.

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