Agricole   

Exploitation individuelle ou société agricole : comment choisir ?

Publié le August 21, 2024 par Bernard Charlotin
Partager
Exploitation individuelle ou société agricole : comment choisir ?

Le choix du statut juridique pour l'achat d'une exploitation agricole est une étape cruciale qui peut influencer la gestion, la fiscalité, et la transmission de l'exploitation. En France, plusieurs statuts sont disponibles, chacun avec ses avantages et inconvénients. Cet article explore les statuts d'exploitation individuelle et de sociétés telles que l'EARL, le GAEC, et la SCEA, ainsi que leurs implications fiscales et sociales.

Sommaire
1. Préambule
    1.1 Réaliser une activité à plusieurs en société
    1.2 Le mythe de la protection du patrimoine
2. Exploitation Individuelle
3. Exploitation Agricole à Responsabilité Limitée (EARL)
4. Groupement Agricole d'Exploitation en Commun (GAEC)
5. Société Civile d'Exploitation Agricole (SCEA)
6. Comparatif des sociétés
7. Le choix d'une société commerciale
    7.1 Nature de l'activité
    7.2 Types de sociétés commerciales
    7.3 Avantages et inconvénients
8. Le statut social des exploitants
    8.1 Le statut social en exploitation Individuelle
    8.2 Le statut social en sociétés agricoles (EARL, GAEC)
    8.3 Le statut social en sociétés commerciales
9. En conclusion
10. En savoir Plus :

Préambule

Réaliser une activité à plusieurs en société

Si vous souhaitez réalisez votre projet agricole à plusieurs (en dehors du mariage ou du PACS), le choix d’une structure sociétaire parait évident. Mais, l’exploitation individuelle est également envisageable si une personne est le chef d’exploitation et les autres personnes salariés par exemple.

Avant le choix de la personne morale, il est essentiel de valider les modalités de travail en commun, de partage de responsabilité et de s’assurer que les futurs associés partagent les mêmes objectifs.

Même si vous êtes seul, vous avez la possibilité de créer une société, soit en étant le seul associé (EARL) soit en vous associant avec un associé non actif qui sera uniquement apporteur de capital.champs

Le mythe de la protection du patrimoine

Historiquement on conseillait la création d’une société pour protéger son patrimoine privé des risques de l’activité professionnelle. Ce n’est plus vrai.

Depuis le 14 mai 2022, une entreprise individuelle n’engage plus le patrimoine personnel de l’entrepreneur. Cette réforme a d’ailleurs mis fin au statut de l’Entreprise Individuelle à Responsabilité Limitée (EIRL). Auparavant, et depuis quelques années, la maison d’habitation de l’entrepreneur individuel était déjà insaisissable.

Par ailleurs, dans le cadre d’une société civile (SCEA), la responsabilité des associés est indéfinie mais proportionnelle à la détention du capital.

Si la responsabilité des associés est limitée en EARL (au montant du capital social) et en GAEC (2 fois le montant du capital social), cette protection est souvent illusoire. En effet, les banques demandent souvent que les associés se portent caution solidaire des emprunts. Si vous accédez à cette demande, vous ne bénéficierez donc pas de la protection du patrimoine personnel.

Exploitation Individuelle

Caractéristiques

L'exploitation individuelle est la forme la plus simple et la plus courante pour les petites exploitations agricoles. Elle est gérée par un seul exploitant, souvent avec l'aide de sa famille. Dans ce cadre, depuis mai 2022, il y a une distinction entre le patrimoine personnel et professionnel, ce qui signifie que l'exploitant est responsable des dettes de l'entreprise sur son seul patrimoine professionnel et pas sur son patrimoine personnel.

Avantages

  • Simplicité administrative : Moins de formalités administratives et de coûts de création.
  • Gestion autonome : L'exploitant prend toutes les décisions.
  • Responsabilité limitée : séparation du patrimoine privé et professionnel

Inconvénients

  • Difficulté de transmission : La transmission de l'exploitation peut être compliquée en raison de l'absence de parts sociales.

Conséquences fiscales

Les bénéfices sont imposés à l'impôt sur le revenu dans la catégorie des bénéfices agricoles. L'absence de séparation des patrimoines peut entraîner une imposition plus élevée en cas de revenus importants.

Exploitation Agricole à Responsabilité Limitée (EARL)

Caractéristiques

L'EARL est une société civile qui peut être unipersonnelle ou composée de plusieurs associés (jusqu'à 10). Elle permet de limiter la responsabilité des associés à leurs apports en capital.

Les associés exploitants sont nécessairement majoritaires et les associés non exploitants minoritaires.

Avantages

  • Responsabilité limitée : Protection du patrimoine personnel.
  • Facilité de transmission : Les parts sociales peuvent être cédées, facilitant la transmission de l'exploitation.
  • Flexibilité : Possibilité d'accueillir des associés non exploitants.

Inconvénients

  • Formalités administratives : Création et gestion plus complexes qu'une exploitation individuelle.
  • Coût de création : Nécessité d'un capital social minimum de 7 500 euros.

Conséquences fiscales

Les bénéfices sont généralement imposés à l'impôt sur le revenu, mais il est possible d'opter pour l'impôt sur les sociétés. Cette option est irrévocable et doit être choisie avec précaution.

Groupement Agricole d'Exploitation en Commun (GAEC)

Caractéristiques

Le GAEC est une société civile qui permet à plusieurs agriculteurs de mettre en commun leurs exploitations tout en conservant une certaine autonomie. Le nombre d'associés est limité de 2 à 10, et la responsabilité est limitée à deux fois la fraction de capital social détenue par chaque associé.champ de blé avec couché de soleil

Tous les associés doivent participer à l’activité agricole. Il n’est pas possible d’avoir des associés non exploitants.

Avantages

  • Transparence fiscale : Les associés conservent leurs droits sociaux et fiscaux individuels.
  • Solidarité et partage : Mise en commun des ressources et des compétences.

Inconvénients

  • Complexité de gestion : Nécessite une bonne entente entre les associés.
  • Agrément nécessaire : La constitution du GAEC est soumise à l'agrément du préfet.

Conséquences fiscales

Les bénéfices sont imposés à l'impôt sur le revenu au nom des associés, mais il est possible d'opter pour l'impôt sur les sociétés.

Société Civile d'Exploitation Agricole (SCEA)

Caractéristiques

La SCEA est une société civile qui n'impose pas de capital social minimum et offre une grande flexibilité dans la gestion et la composition des associés.

Il est possible d’avoir des associés non exploitants majoritaires au capital social.

Avantages

  • Flexibilité : Pas de capital social minimum requis.
  • Gestion simplifiée : Moins de contraintes réglementaires comparé à d'autres sociétés.

Inconvénients

  • Responsabilité illimitée : Les associés sont responsables des dettes de la société.
  • Moins de protection : Moins de protection du patrimoine personnel comparé à l'EARL ou au GAEC.

Conséquences fiscales

Les bénéfices sont imposés à l'impôt sur le revenu, mais il est possible d'opter pour l'impôt sur les sociétés, offrant ainsi une certaine flexibilité fiscale.

Comparatif des sociétés

Type de société

SCEA

GAEC

EARL

Nombre minimum d’associés

Min 2

2 à 10

1 à 10

Capital social minimum

Pas de minimum

1 500 €

7 500 €

Agrément requis

Non

Oui

Non

Responsabilité

Illimitée

Limité à 2x part

Limité à apport

Imposition

IR ou IS

IR, peut opter pour IS

IR ou IS

Droit de vote

Proportionnel aux parts

1 voix par associé

Proportionnel aux parts

Le choix d'une société commerciale

Lorsqu'il s'agit de choisir un statut juridique pour une exploitation agricole, les sociétés commerciales peuvent également être envisagées, bien qu'elles soient moins courantes que les structures civiles comme l'EARL ou le GAEC. Voici un aperçu des critères à considérer pour opter pour une société commerciale dans le cadre d'une exploitation agricole :

Nature de l'activité

Les sociétés commerciales sont particulièrement adaptées lorsque l'activité agricole s'accompagne d'activités commerciales, telles que l'achat-revente de produits agricoles ou la prestation de services connexes. Cela permet de regrouper ces différentes activités au sein d'une même structure juridique, facilitant ainsi la gestion et la comptabilité.

Types de sociétés commerciales

Parmi les sociétés commerciales possibles, on trouve :

  • Société à responsabilité limitée (SARL) : Offre une responsabilité limitée aux apports, similaire à l'EARL, mais avec une plus grande flexibilité pour inclure des activités commerciales.
  • Société anonyme (SA) : Adaptée pour les grandes exploitations nécessitant un capital important et souhaitant lever des fonds.
  • Société en nom collectif (SNC) : Implique une responsabilité solidaire et illimitée des associés, mais peut être intéressante pour des partenariats de confiance.
  • Groupement d'intérêt économique (GIE) : Vise à faciliter ou développer l'activité de ses membres sans objectif de profit direct.

Avantages et inconvénients

  • Avantages : Les sociétés commerciales permettent une séparation claire entre le patrimoine personnel et professionnel, offrent une structure adaptée pour des activités diversifiées, et facilitent l'accès à des financements externes.
  • Inconvénients : Elles nécessitent une gestion administrative plus complexe, avec des obligations comptables et juridiques plus lourdes. De plus, elles peuvent être soumises à l'impôt sur les sociétés, ce qui peut être moins avantageux fiscalement pour certaines exploitations agricoles.champ de blé

Choisir une société commerciale pour une exploitation agricole peut être pertinent lorsque l'activité dépasse le cadre strictement agricole et inclut des éléments commerciaux significatifs. Ce choix doit être bien réfléchi en fonction des objectifs de l'exploitation, de la nature des activités envisagées, et des implications fiscales et administratives. Il est conseillé de consulter un expert juridique ou fiscal pour déterminer la structure la plus adaptée à ses besoins spécifiques.

Le statut social des exploitants

Un associé exploitant d'une société agricole a le même statut qu'un chef d'exploitation individuelle qui est affilié à la MSA. Les cotisations sociales sont calculées sur la quote-part de revenu de chaque associé (rémunération du travail + quote-part de résultat). 

Dans certaines conditions il est possible en SCEA ou EARL d'être à la fois associé et salarié de la société avec donc un statut social différent.

Le choix du statut social des associés dans une exploitation agricole dépend du type de structure choisie, qu'elle soit individuelle, sociétaire ou commerciale. Voici un aperçu des statuts sociaux associés à chaque type de structure :

Le statut social en exploitation Individuelle

Dans une exploitation individuelle, l'exploitant est considéré comme un travailleur non salarié agricole. Ce statut implique qu'il cotise à la Mutualité Sociale Agricole (MSA) pour sa couverture sociale, qui inclut la retraite, la maladie, et les prestations familiales. Les membres de la famille qui participent aux travaux de l'exploitation peuvent avoir le statut de collaborateur d'exploitation ou d'aide familial, ce qui leur permet de bénéficier d'une protection sociale spécifique.

Le statut social en sociétés agricoles (EARL, GAEC)

  • EARL (Exploitation Agricole à Responsabilité Limitée) : Les associés ont le statut de non-salariés agricoles. Ils cotisent à la MSA, sauf s'ils sont salariés de la structure, auquel cas ils sont salariés affiliés à la MSA. L'EARL permet également d'intégrer des associés non exploitants, qui peuvent être des apporteurs de capitaux sans statut social agricole.
  • GAEC (Groupement Agricole d'Exploitation en Commun) : Les associés sont également considérés comme des non-salariés agricoles et bénéficient du principe de transparence qui leur permet de conserver les droits sociaux auxquels ils auraient pu prétendre en tant qu'exploitants individuels. Tous les associés doivent participer effectivement au travail et à la gestion du groupement, et ils perçoivent une rémunération mensuelle.

Le statut social en sociétés commerciales

Dans le cadre d'une société commerciale, les associés peuvent avoir différents statuts sociaux selon leur rôle dans l'entreprise :

  • Associés non salariés : Ils peuvent être considérés comme des travailleurs non salariés agricoles s'ils participent activement à l'exploitation agricole.
  • Salariés : Si les associés sont employés par la société, ils relèvent du régime général salarié de la Mutualité Sociale Agricole.
  • Apporteurs de capitaux : Ces associés peuvent ne pas avoir de statut social agricole spécifique, surtout s'ils ne participent pas activement à l'exploitation.

Ainsi, le choix du statut social est étroitement lié à la structure juridique de l'exploitation agricole et aux rôles des associés au sein de celle-ci. Il est crucial de bien évaluer ces aspects pour assurer une couverture sociale adéquate et conforme aux obligations légales.

En conclusion

Le choix du statut juridique d'une exploitation agricole dépend de nombreux facteurs, notamment la taille de l'exploitation, le nombre d'associés, et les objectifs à long terme. Chaque statut présente des avantages et des inconvénients en termes de responsabilité, de gestion, et de fiscalité. Il est crucial de bien évaluer ces aspects avant de prendre une décision, et de consulter un expert pour choisir la structure de son exploitation.

En savoir Plus :

Thème

Article

Le prix des exploitations

Le prix des terres en France en 2023
Combien coûte une exploitation agricole

Accès au foncier

Trouver une ferme pour s'installer en agriculture
S'installer sur des friches agricoles
Peut-on acheter des terres agricoles sans être agriculteur

Bail rural

Le lien fondamental entre exploitation agricole et bail rural en France

Financement

Combien gagne un agriculteur en France ?
Les outils de financement alternatifs

Formation

Faut-il un diplôme pour devenir agriculteur
Obtenir la capacité agricole

Juridique

La définition de l'activité agricole
Exploitation individuelle ou société agricole - comment choisir
Acquéreurs - Les 5 points importants du compromis de vente
Dépôt de Garantie - Est-il obligatoire ou négociable ?

Fiscal / Social

Les cotisations sociales MSA des agriculteurs
Quel impôt pour les agriculteurs ?

Les démarches

Les 8 étapes de l'achat d'une exploitation agricole
Et si la SAFER Préempte
Comprendre le Contrôle des Structures
Le contrôle des cessions de parts de sociétés agricoles - La Loi Sempastous

Diversification

Peut-on planter des arbres sur un terrain agricole ?
Agritourisme, Œnotourisme, Wwoofing… les différentes facettes du Tourisme Rural

Urbanisme

Peut-on construire ou agrandir une maison sur un terrain agricole