La loi Le Meur, adoptée le 19 novembre 2024 et entrée en vigueur le 1er janvier 2025, bouleverse la fiscalité des locations meublées touristiques en France. Ce projet de loi répond à un double enjeu : réguler l'hébergement touristique dans les zones tendues tout en préservant l'accès au logement pour les résidents locaux.
Avec l'explosion des locations de courte durée via des plateformes comme Airbnb, le législateur a souhaité encadrer strictement l'activité de location meublée, qu'il s'agisse de meublés de tourisme, de gîtes ou de chambres d'hôte. Les nouveaux taux d’abattement et les règles de déclaration renforcées redéfinissent les stratégies des propriétaires.
Cet article décrypte les nouvelles règles issues de la loi du 19 novembre, en distinguant les régimes applicables aux différents types de locations et en analysant leurs implications sur l'impôt sur le revenu, le régime micro-BIC ou le régime réel. Une attention particulière est portée aux enjeux de transition écologique, avec l’obligation du diagnostic de performance énergétique (DPE), et aux modifications des règlements de copropriété.
Le régime micro-BIC, applicable aux loueurs en meublé non professionnels (LMNP), connaît des changements importants à partir de janvier 2025. La nouvelle loi modifie les plafonds et les taux d'abattement forfaitaire, impactant directement l'imposition des revenus locatifs.
Le plafond de chiffre d'affaires pour l'éligibilité au régime micro-BIC est désormais fixé à 77 700 € pour les meublés de tourisme classés et les chambres d'hôtes. Cette baisse significative par rapport à l'ancien seuil de 188 700 € vise à limiter l'avantage fiscal pour les propriétaires de multiples biens en location touristique.
Pour les meublés de tourisme non classés, le plafond est réduit à 15 000 € de revenus locatifs annuels contre 77 700 € précédemment. Cette distinction encourage les propriétaires à faire classer leurs hébergements touristiques pour bénéficier d'un régime fiscal plus avantageux.
L'abattement forfaitaire, qui permet de déterminer le revenu imposable dans le cadre du régime micro-BIC, a également été revu à la baisse pour certaines catégories de locations meublées touristiques.
La loi Le Meur introduit une différenciation des taux d'abattement fiscal selon le type de location meublée touristique, créant ainsi une hiérarchie fiscale entre les différentes formes d'hébergement.
Les meublés de tourisme classés bénéficient d'un abattement fiscal de 50% sur leurs revenus locatifs. Ce taux, bien que réduit par rapport à l'ancien régime (70%), reste plus avantageux que celui appliqué aux meublés non classés, incitant les propriétaires à faire classer leurs biens.
Pour les meublés de tourisme non classés, l'abattement fiscal est fixé à 30% (contre 50% précédemment). Cette réduction vise à encourager les propriétaires à améliorer la qualité de leurs hébergements et à obtenir un classement officiel.
Ces nouveaux taux d'abattement ont un impact direct sur le calcul de l'impôt sur le revenu et des prélèvements sociaux. Par exemple, pour un chiffre d'affaires de 50 000 € :
Cette différence significative incite fortement les propriétaires à faire classer leurs biens pour optimiser leur fiscalité.
Aucune modification n’a pour le moment été adoptée concernant les règles d’imposition au bénéfice réel que ce soit dans la Loi Le Meur ou dans le cadre de la Loi de Finances pour 2025.
Il est toutefois question de déduire les amortissements pratiqués du prix de revient pour le calcul de la plus-value en cas de revente. Ce qui reviendrait à majorer fortement la plus-value et donc les prélèvements fiscaux en cas de revente avant 30 ans.
Cette disposition pourrait toutefois faire l’objet d’une adoption future. Il convient donc de rester attentif aux évolutions législatives.
Les gîtes, forme populaire d'hébergement touristique en zone rurale, sont également concernés par les nouvelles dispositions fiscales de la loi Le Meur. Il convient donc de rester attentif aux évolutions législatives.
Bien que la loi ne donne pas de définition spécifique des gîtes, ils sont généralement considérés comme des meublés de tourisme situés en zone rurale. À ce titre, ils sont soumis aux mêmes règles fiscales que les autres meublés de tourisme, avec quelques particularités.
Les gîtes sont soumis aux mêmes plafonds et taux d'abattement que les autres meublés de tourisme. Ainsi, un gîte classé bénéficiera de l'abattement de 50%, tandis qu'un gîte non classé sera soumis à l'abattement de 30%.
Il est important de noter que certains acteurs du secteur plaident pour un traitement fiscal différencié des gîtes, arguant de leur rôle dans le développement touristique des zones rurales. Cependant, à l'heure actuelle, aucune disposition spécifique n'a été adoptée.
Les propriétaires de gîtes sont soumis aux mêmes obligations déclaratives que les autres loueurs en meublé touristique. Ils doivent notamment :
Les meublés de tourisme classés bénéficient d'un traitement fiscal plus avantageux, ce qui incite les propriétaires à entreprendre cette démarche.
Le classement des meublés de tourisme est une procédure volontaire qui permet d'obtenir de 1 à 5 étoiles. Les critères de classement incluent :
Malgré la réduction de l'abattement forfaitaire, les meublés de tourisme classés conservent un avantage fiscal significatif par rapport aux non classés :
La procédure de classement implique une visite de contrôle par un organisme accrédité. Le classement est valable pour une durée de 5 ans. Dans le contexte de la nouvelle fiscalité, cette démarche prend une importance accrue pour les propriétaires souhaitant optimiser leur imposition.
Les chambres d'hôtes bénéficient du même traitement fiscal distinct que les meublés de tourisme classés depuis la loi du 19 novembre 2024.
Pour être reconnue comme telle, l'activité doit répondre à trois critères :
Nouveauté 2025 : Le plafond de revenus pour l'application du régime micro-BIC passe à 77 700 € annuels contre 188 700 € précédemment. Ce changement vise à limiter les dérives commerciales de cette activité.
Les chambres d'hôtes conservent un abattement fiscal de 50% sous conditions :
La nouvelle loi introduit une distinction claire entre :
Les locations non touristiques relèvent désormais du régime LMNP classique avec un abattement de 30% sur les revenus (vs 50% précédemment) dans le cadre du régime Micro-BIC.
"La loi Le Meur marque un tournant dans la fiscalité des locations en alignant progressivement le régime des locations meublées non professionnelles sur celui des locations nues." - Extrait des débats à l'Assemblée nationale
En synthèse, la nouvelle fiscalité introduite par la loi Le Meur marque un tournant historique pour le secteur de la location meublée touristique. En abaissant les plafonds du régime micro-BIC, en modulant les abattements fiscaux selon le classement des hébergements et en durcissant les contrôles sur la durée de location, le législateur cherche à rééquilibrer les marchés immobiliers locaux.
Les propriétaires de meublés de tourisme classés conservent un avantage fiscal significatif (50% d’abattement), incitant à l’amélioration de la qualité de l’hébergement touristique. À l’inverse, les locations saisonnières non régulées en zone tendue font l’objet de restrictions inédites, avec une possible limite maximale de 90 jours de location annuels et des sanctions pour fausse déclaration.
La mise en place obligatoire du DPE dès 2025 et l’interdiction progressive des logements énergivores illustrent l’intégration des enjeux de transition écologique dans la fiscalité locative. Parallèlement, les règlements de copropriété évoluent pour limiter l’impact des locations de courte durée sur la vie des résidents.
Pour les loueurs, l’adaptation à cette nouvelle loi implique :
Avec ces mesures visant à renforcer l’équilibre entre tourisme et habitat permanent, la loi Le Meur redessine les contours de la location meublée en France, tout en ouvrant des pistes de réflexion sur la régulation des plateformes numériques et la préservation du service public du logement.